Le tiers et l'inexécution du contrat

Le rejet du tiers de la sphère contractuelle n'est autre que la conséquence d'un individualisme à outrance, qui a pesé si lourd et si longtemps sur le contrat, au point de le suffoquer. Les tenants de l'individualisme ont, en effet, trouvé dans ce qu'ils baptisaient « la règle de l'effet relatif du contrat », une source intarissable pour exaucer leurs voeux de conserver le contrat dans un splendide isolement, à l'abri de toute intrusion parasitaire des tiers.

La soumission du contrat à une pure analyse juridique conduit à son isolation clinique alors que la réalité est toute autre.

En revanche, la prise en considération du phénomène contrat, comme créateur d'une situation juridique objective, constitue l'apport fondamental de l'approche sociale du contrat.

Les mutations socio-économiques ont fait que le tiers n'est plus un exclu du contrat. Le statut du tiers se doit, dès lors, d'être repensé.

Si le contrat n'a de force obligatoire qu'entre les parties, il n'en constitue pas moins un fait juridique opposable aux tiers et par les tiers. C'est la réalité que cette étude essaie de mettre en lumière, sous un aspect des plus importants de la théorie générale du contrat, à savoir son inexécution. Le tiers peut, en effet, être impliqué dans l'inexécution du contrat, non seulement, par exception au principe de la relativité, mais, aussi, par application du principe de l'opposabilité.

Cette prise de conscience de l'immixtion du tiers dans la sphère contractuelle met en jeu la sécurité juridique des différents protagonistes, désormais, présents sur la scène contractuelle.

Immixtion du tiers et sécurité juridique, c'est tout l'équilibre sur lequel devrait reposer la construction que l'on se propose du statut de « tiers » vis-à-vis de l'inexécution du contrat.

L'objectif de l'étude est de démontrer que, bien que n'ayant pas participé aux rites créateurs du contrat, le tiers développe des interactions croissantes avec le contrat, soit en tant que responsable, soit, encore, en tant que victime de son inexécution.