Vers une nouvelle sensibilité analytique : le vivant (et le mort) dans le cabinet d'analyse

Vers une nouvelle sensibilité analytique

« S'il vous plaît, disait Bion, essayez de ne pas comprendre. Si vous devez « prendre » quelque chose, méta-prenez, para-prenez, circum-prenez, mais par pitié ne comprenez rien. » La compréhension est une activité mentale plutôt passive eu égard à la possibilité de se méprendre et d'utiliser cette « faille » pour en faire quelque chose. Dans la séance d'analyse, la visée compréhensive comporte le danger, de « tuer » une expérience qui était vivante. En un sens, une fois qu'une expérience a été « comprime », elle est morte. » Thomas Ogden

Reprenant huit articles parus entre 2016 et 2020, Thomas Ogden nous montre ici le cheminement l'ayant conduit à théoriser ce qu'il appelle un « changement d'orientation » de la psychanalyse en réponse aux transformations radicales (et plutôt silencieuses) subies par la discipline depuis la fin du XX^e siècle.

Selon Ogden, nous passons aujourd'hui d'une psychanalyse épistémologique à une psychanalyse ontologique. Si la première s'efforce de comprendre et d'interpréter les conflits psychiques et le monde interne de l'analysant en privilégiant les contenus (rêves et associations libres) apportés en séance, la seconde, appuyée sur le contenant (l'appareil à penser les pensées et la capacité de penser), utilise d'abord non pas la connaissance de soi mais l'expérience de soi. Dans la psychanalyse épistémologique, la technique principale est l'interprétation du transfert ; dans la psychanalyse ontologique, où il est question d'être et de devenir, l'essentiel se joue par un maniement très délicat du contre-transfert, mobilisant la rêverie de l'analyste et la dynamique de la relation analytique. Inspiré par Searles, Winnicott et Bion, Ogden parachève dans cet ouvrage 40 ans de recherches analytiques au-delà de la névrose, en démontrant la pertinence de la psychanalyse face aux défis de la clinique du XXI^e siècle.